Entrez dans une herboristerie chinoise et passez devant les piles de ginseng et de champignons, et l’une des premières odeurs que vous percevez est celle d’un brin d’orange piquant et sucré. Il s’agit d’écorces d’orange, séchées et vieillies en bandes souples et coriaces appelées chenpi.
Alors que l’hiver approche, si vous luttez contre une toux, un écoulement nasal ou si vous en êtes à votre troisième paquet de mouchoirs de la semaine, ces petits compagnons vont devenir vos nouveaux meilleurs amis.
La soupe au poulet est peut-être le remède contre le rhume, mais rien ne peut apaiser un mal de gorge comme le chenpi. Ses huiles d’agrumes douces et rafraîchissantes, tempérées par des mois, voire des années, de vieillissement en quelque chose de sombre et de riche, semblent tout apaiser.
Qu’est ce que le chenpi ?
Le chenpi est un aliment de base de la phytothérapie chinoise depuis le Xe siècle, mais son mode d’administration le plus savoureux n’a que quelques décennies. Il s’agit d’un thé appelé ganpu, et c’est peut-être la plus grande invention depuis le sachet de thé.
Voici ce que vous devez faire :
Découpez une mandarine, séchez la peau, emballez-la avec des feuilles de thé séchées et laissez-la vieillir quelques années pour que le thé et les agrumes se mélangent.
Le résultat est une boule compacte de thé doux, riche et guttural que vous faites infuser avec la peau de l’orange pour faire bonne mesure. Il est aussi bon seul qu’avec un peu de lait et de miel.
Le plus beau, c’est que vous n’avez pas besoin d’un équipement de thé sophistiqué pour l’infuser. Il suffit d’en mettre une dans votre théière ou votre tasse à café standard et de la recouvrir d’eau bouillante. La peau d’agrume maintient les feuilles de thé en sécurité au fond, tout en envoyant un parfum d’orange capiteux directement dans vos narines encombrées.
Le ganpu est une affaire importante dans la province chinoise du Guangdong (sud-est), où les agrumes les plus prisés du pays – les mandarines Xinhui – poussent en abondance. Les peaux d’orange entrent également dans la composition de plats cantonais classiques, comme le bœuf haché enveloppé de nouilles de riz, mais les chenpis farcis de thé atteignent les prix les plus élevés.
Quel type de thé utiliser ?
Le thé est généralement du puer, un thé fermenté de la province du Yunnan, très apprécié dans le Guangdong et à Hong Kong pour son goût sombre et terreux et son caractère dérangeant pour l’estomac. Vous pouvez en trouver de très bonne qualité ici. C’est le thé par excellence pour accompagner les dim sum, et sa saveur riche et douce est la contrepartie parfaite des arômes vifs et citronnés du chenpi.
Comme le chenpi, le puer prend généralement de la valeur avec l’âge, et les meilleurs lots de ganpu peuvent être conservés pendant des décennies avant d’être infusés, afin de développer des saveurs racinaires semblables à celles de l’amaro.
Les ganpu d’aujourd’hui se déclinent en deux styles principaux, déterminés par la maturité du fruit au moment de sa cueillette et de son empaquetage. Une mandarine Xinhui complètement mûre a la taille et la forme d’une clémentine et, une fois séchée et remplie de puer, elle pèse environ 30 grammes de thé doux, ensoleillé et à l’arôme d’orange.
Il y a aussi la nouvelle mode : les minuscules mandarines, cueillies alors qu’elles sont encore vertes et transformées en billes acidulées de huit grammes. Les deux sont excellentes, et votre préférence dépendra de vos goûts personnels. Les mandarines mûres ont un goût plus classique d’orange, tandis que les vertes sont plus vives, presque citronnées, avec un goût subtil.
Pour une mandarine orange de taille normale, on casse généralement la peau pour l’infuser avec quelques feuilles comme n’importe quel autre thé. Mais les versions vertes sont suffisamment petites pour être servies seules. Un ganpu vert au fond d’une tasse à café me suffit généralement pour toute la journée, et vous pouvez retremper le thé dans de l’eau bouillante fraîche au moins cinq ou six fois avant que la saveur ne commence à s’estomper.
Où trouver du ganpu ?
Vous pouvez trouver du ganpu solide dans les épiceries chinoises bien achalandées, mais comme pour tout ce qui concerne le thé, vous obtiendrez une meilleure qualité chez un spécialiste.
Un sac de 200 grammes en contient environ 25 tasses, ce qui revient à un peu plus d’un euro par tasse. C’est plus cher qu’un sachet de thé, mais si l’on considère la durée de vie d’un seul ganpu de huit grammes, c’est une aubaine par rapport au coût de votre café au lait du matin.
Tous ces produits valent la peine d’être essayés et expérimentés, et ils feront du temps du flegme de l’histoire ancienne.